mardi 19 mai 2015

Lisbonne en side-car

Ce matin, découverte-repérage de Lisbonne. Et pour une fois, on va se faire prendre en charge...
Les visites en groupe, ce n'est pas vraiment notre truc... On a craqué pour une autre formule, nettement plus intéressante et beaucoup plus sympathique, celle des "greeters", des habitants qui font découvrir leur ville. Et on va faire çà... en side car !
Un échange de mail avec Joao pour convenir de l'heure à laquelle on viendra nous chercher à l'appartement, un numéro de téléphone,  et c'est tout ! Pas de confirmation la veille, pas de paiement d'avance, pas d'acompte ! Confiance, confiance...

On a rendez-vous à 9h mais on est sorti plus tôt pour aller prendre un café avec ce qui est devenu un incontournable, le pastéis de nata. Puis profiter de la lumière du matin sur la ville basse depuis le belvédère de San Esteban. Là, surprise... ou déconvenue... A quai, juste en contrebas, un immense paquebot de croisière, 6? 8? étages de cabines plus les ponts supérieurs, qui est arrivé dans la nuit... et déverse son flot de touristes vers des dizaines et des dizaines de cars... C'est l'Allure of the Seas... le plus grand paquebot du monde... D'où nous sommes, à mi hauteur de l'Alfama quand même... nous ne voyons même pas sur le pont supérieur...



9 heures sonnent au clocher de San Esteban et nous entendons le side avant de le voir... çà pétarade sec !




Pedro va être notre conducteur-accompagnateur pour la matinée et il parle un français parfait. Il nous tend les casques et c'est parti ! Pierre -pour une fois- en passager arrière et moi à côté.



On commence par un tour dans l'Alfama avec ses belvédères, celui de Ste Lucie, celui das Portas do Sol, ses églises dont La Sé Patriarcal, le château Sao Jorge, puis nous traversons le quartier Mouraria avec son marché aux puces, la Feira da Ladra, qui s'installe pour nous diriger vers celui de Graça.


Les rues sont toujours aussi sinueuses mais les immeubles plus cossus que dans l'Alfama.

Nous passons devant le Panthéon, avant de faire halte au belvédère da Graça d'abord qui offre une vue panoramique sur l'est de la ville et le château, puis à celui de Senhora do Monte un peu plus haut où la vue est plus large. Et il y a un plan de Lisbonne sur un panneau d'azulejos (prononcer azuléios dit Pedro !) pour repérer les attraits majeurs de la ville.

De là nous nous nous dirigeons vers la Baixa ou ville basse.
Banques, grands magasins, boutiques internationales, c'est le quartier commerçant de Lisbonne et on se retrouve plongés en pleine circulation... Du coup çà laisse le temps de regarder autour et.... d'être regardés ! Le side-car ne passe pas inaperçu...

Pedro nous explique que de tout temps, la Baixa (prononcer Baïcha) a été le cœur économique de la ville, que les rues portent souvent le nom des corporations qui s'y étaient établies et débouchent sur l'historique Praça do Commercio, où les bateaux arrivant du Brésil ou des Indes déchargeaient leurs cargaisons... Un max de touristes... on continue !

On continue vers l'Ouest et le Chiado.
Il y a une petite trentaine d'années, le quartier a été ravagé par un incendie. Sa reconstruction s'est faite, nous explique Pedro, avec la volonté d'associer traditions et modernité. Du coup, beaucoup de façades ont été préservées, on a créé des rue larges et rectilignes, aménagé des espaces verts... Mais c'est devenu cher...  la population a changé, les boutiques aussi... Maintenant c'est -comment vous dites en français?- un quartier bobo, c'est çà ? Oui, çà en a bien l'air...

Une halte dans un des cafés historiques de Lisbonne A Brasileira -historique parce que c'était en quelque sorte le QG de Fernando Pessoa- avant de nous diriger vers le Bairro Alto et le Largo do Carmo.


Sur le Largo do Carmo, deux lieux majeurs de l'histoire de Lisbonne et du Portugal.  Les ruines de la plus grande église gothique de la ville, détruite par le tremblement de terre, voisinent avec la caserne des gardes républicains dans laquelle les opposants au dictateur Salazar s'étaient réfugiés. Pedro nous raconte que c'est la marchande de fleurs du kiosque voisin qui a distribué des oeillets à leurs partisans rassemblés sur la place et que pour démontrer leur volonté pacifique, ils en ont garni les fusils des gardes qui ont fini par basculer de leur côté. D'où la révolution dite des oeillets... Pendant notre révolution, il n'y a pas eu un seul coup de feu, nous dit il fièrement avec beaucoup d'émotion.

Un petit détour par les deux belvédères du quartier, Santa Catarina avec son point de vue sur le Tage et le Cristo Rei en face, et Sao Pedro qui donne lui sur la Baixa face à la colline du château de Sao Jorge puis direction Belem.



Séquence sensations fortes : première ! Nous voilà sur la voie rapide qui longe le Tage, face au vent et au milieu des voitures... Elles tranquilles à 90, nous à 50... à fond. Le side vibre de partout, le moteur tourne à plein régime et nous les cheveux dans le vent... Plein de gens nous prennent en photo.

çà dure juste ce qu'il faut pour que çà reste fun et nous voilà sur l'esplanade devant le Mosteiro dos Jeronimos, autrement dit le monastère non pas de Geronimo, ni même de Jéronimo mais des Hyéronimites...
Le style, faut aimer... mais c'est le summum de l'art manuélin. Au départ, il y avait une chapelle où venaient se recueillir les marins en partance pour le grand large. Puis les richesses d'Extrême Orient on afflué, les architectes ont eu une ligne de crédit illimitée et s'est devenu le symbole de la toute puissance du Portugal de l'ère des colonies. Il y a un monde fou...
Plus loin, la tour de Belem. C'est LE monument emblématique de Lisbonne... Elle a vu partir toutes les caravelles vers l'orient et les Amériques...

Aperçu rapide de l'ensemble -ce n'est pas le but du tour... avant de remonter dans le side.
Direction cette fois-ci, le nec plus ultra des pâtisseries portugaises, le temple du pastel de nata, l'Antiga Confeitaria de Belem.

Au moins 50m de queue sur le trottoir en plein vent... Heureusement, Pedro est ici comme chez lui et connu comme le loup blanc ! Il nous guide à travers un dédale de salles aux murs recouverts d'azulejos, serre des mains ici et là, fait un signe à un serveur et nous voilà attablés ! Trop fort ! On a squeezé toutes les files d'attente ! Pastéis de nata et café pour tout le monde !

Pedro nous raconte que le secret de fabrication est jalousement gardé depuis presque 200 ans. Que seules 3 personnes en connaissent la composition exacte et qu'elles ne voyagent jamais ensemble... Donc, que tout ce qui est servi ailleurs n'est que pâle imitation... Qu'ici, on en produit presque 10 000 par jour et que de nombreux Lisboètes font le déplacement quotidien à Belem rien que pour eux ! Pierre Hermé peut en prendre de la graine ! Bon, c'est vrai qu'ils sont très bons et ont un petit quelque chose en plus...

Il n'est pas loin de 13h et notre tour avec Pedro touche à sa fin.
C'était vraiment une super formule pour un premier aperçu de Lisbonne ! Aux "classiques", il a ajouté ses coups de cœur, nous a fait sortir des grands axes touristiques, nous a donné quelques bons plans pour les jours à venir. Et surtout, autour d'un café, lors de nos haltes, on a pu confronter nos expériences du quotidien, il nous a fait toucher du doigt ce qu'est aujourd'hui celui des Portugais, otages d'un redressement économique à marches forcées, entre marché de l'emploi précaire, salaires bas et prix élevés. Et çà, ce n'est pas dans un bus ou un guide à la main que c'est possible !